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Trumbley et Pugh c. Police de la com. urb. de Toronto, [1987] 2 R.C.S. 577

 

Gordon Trumbley et Rodney Pugh                                                   Appelant (Requérant)

 

et

 

Robert Fleming, Jack Ackroyd, Jack Marks, la police de la communauté urbaine de Toronto   Intimés (Intimés)

 

et

 

Metropolitan Toronto Police Association                                         Intervenante (Intervenante)

 

et

 

Le procureur général du Canada                                                      Intervenant

 

Le procureur général de l'Ontario                                                    Intervenant (Intervenant)

 

Le procureur général du Québec                                                      Intervenant

 

Le procureur général du Nouveau‑Brunswick                                 Intervenant

 

répertorié: trumbley et pugh c. police de la communauté urbaine de toronto

 

No du greffe: 20081.

 

1987: 4, 5, 6 mars; 1987: 19 novembre.

 


Présents: Le juge en chef Dickson et les juges Beetz, Estey, McIntyre, Lamer, Wilson et La Forest.

 

en appel de la cour d'appel de l'ontario

 

                   Droit constitutionnel ‑‑ Charte des droits ‑‑ Affaires criminelles et pénales ‑‑ Droit à un tribunal indépendant et impartial ‑‑ Comparution d'un agent accusé d'infractions majeures ressortissant au service devant le surintendant de la police ‑‑ L'article 11 de la Charte s'applique‑t‑il dans les circonstances? ‑‑ Dans l'affirmative, les procédures sont‑elles incompatibles avec l'art. 11? ‑‑ Dans l'affirmative, l'article premier permet‑il de justifier le règlement? ‑‑ Charte canadienne des droits et libertés, art. 11d)  ‑‑ Règlement 791, R.R.O. 1980, Code of Offences, art. 1a)(i).

 

                   Les agents Trumbley et Pugh ont été accusés de deux infractions majeures ressortissant au service et l'inspecteur du personnel a été saisi de l'affaire. La Cour divisionnaire a rejeté une demande d'examen judiciaire à l'égard de certaines décisions en matière de procédure et de preuve. Elle a statué, sans trancher la question de l'applicabilité de l'art. 11  de la Charte  aux procédures disciplinaires de la police, qu'il n'y avait aucune violation de l'al. 11d) et que le tribunal disciplinaire de la police était indépendant et impartial. La Cour d'appel a confirmé cette décision. Les questions constitutionnelles devant cette Cour portent sur le fait de savoir (1) si l'al. 11 d )  de la Charte  s'applique aux procédures disciplinaires de la police prévues par le Code of Offences et dans l'affirmative (2) si le Code of Offences est incompatible avec la Charte  et, dans l'affirmative, si l'article premier de la Charte  permet de justifier le règlement.

 

                   Arrêt: Le pourvoi est rejeté; la première question constitutionnelle reçoit une réponse négative.

 

                   Pour les motifs donnés dans l'arrêt R. c. Wigglesworth, [1987] 2 R.C.S. 541, l'art. 11 ne s'applique pas aux procédures disciplinaires de la police aux termes du règlement 791, R.R.O. 1980. Les mesures disciplinaires en l'espèce ne sont pas de nature criminelle et ne comportent pas de conséquences pénales. Contrairement à l'arrêt Wigglesworth, l'appelant n'est pas susceptible d'être emprisonné aux termes de la Police Act.

 

Jurisprudence

 

                   Arrêts suivis: Trimm c. Police régionale de Durham, [1987] 2 R.C.S. 582; R. c. Wigglesworth, [1987] 2 R.C.S. 541; Burnham c. Police de la communauté urbaine de Toronto, [1987] 2 R.C.S. 572.

 

Lois et règlements cités

 

Charte canadienne des droits et libertés , art. 11 d ) .

 

Police Act, L.R.O. 1980, chap. 381, art. 74(1).

 

Règlement 791, R.R.O. 1980, Code of Offences, art. 1a)(i).

 

                   POURVOI contre un arrêt de la Cour d'appel de l'Ontario (1986), 55 O.R. (2d) 570, 29 D.L.R. (4th) 557, 15 O.A.C. 279, qui a rejeté un appel contre un jugement de la Cour divisionnaire de l'Ontario (1984), 5 O.A.C. 368, qui avait rejeté une demande d'examen judiciaire. Pourvoi rejeté; la première question constitutionnelle reçoit une réponse négative.

 

                   E. G. Spong et D. A. Quirt, pour l'appelant.

 

                   R. M. Parker, c.r., et M. S. Watson, pour les intimés.

 

                   Julius Isaac, c.r., pour l'intervenant le procureur général du Canada.

 

                   Dennis W. Brown, c.r., et Michael W. Bader, pour l'intervenant le procureur général de l'Ontario.

 

                   Yves de Montigny et Françoise Saint‑Martin, pour l'intervenant le procureur général du Québec.

 

                   Grant Garneau, pour l'intervenant le procureur général du Nouveau‑Brunswick.

 

                   Version française du jugement de la Cour rendu par

 

1.                Le juge Wilson‑‑Pendant la période visée, les agents Trumbley et Pugh étaient membres du corps de police de la communauté urbaine de Toronto. Ils ont tous les deux été accusés de [TRADUCTION]  "conduite déshonorante" en vertu du sous‑al. 1a)(i) du Code of Offences, règl. 791, R.R.O. 1980 (annexe). Selon certains détails de l'affaire, ils auraient eu des relations sexuelles avec une femme dans une "voiture de reconnaissance". L'infraction a été qualifiée de majeure. Le chef de police, John W. Ackroyd, a chargé le surintendant Robert Fleming de tenir une audience. Le chef de police a ensuite chargé John Addison, l'inspecteur du personnel, de [TRADUCTION]  "diriger les procédures", conformément à l'art. 13 du règlement.

 

2.                Les deux agents ont demandé à la Cour divisionnaire d'examiner certaines décisions en matière de procédure et de preuve rendues par le surintendant Fleming au cours de l'audience. La Cour divisionnaire a jugé non recevable chacun des arguments des requérants et a rejeté leur demande. La cour a statué, sans trancher la question de l'applicabilité de l'art. 11 aux procédures disciplinaires de la police, qu'il n'y avait aucune violation de l'al. 11 d )  de la Charte . Le comité de discipline de la police était un tribunal indépendant et impartial.

 

3.                L'appel à la Cour d'appel de l'Ontario a été rejeté: (1986), 55 O.R. (2d) 570. Le juge Morden a examiné, au nom de la Cour, le texte de l'art. 11 et a fait remarquer qu'il était rempli de termes propres au droit criminel. Il a également examiné l'historique législatif de l'art. 11, la note marginale de cet article, ainsi que la jurisprudence et la doctrine sur la question. Il a conclu (à la p. 583) que [TRADUCTION]  "le terme "infraction" s'entend d'une infraction qui fait l'objet de poursuites dans une affaire criminelle ou pénale". À la page 589, il a dit:

 

                   [TRADUCTION]  À mon avis, une procédure disciplinaire aux termes de la Police Act ne constitue pas une affaire criminelle ou pénale au sens de l'art. 11. Dans de telles instances, la conséquence la plus grave qui peut en découler pour un agent de police est son licenciement et bien que je ne veuille pas en réduire la gravité, il s'agit d'une conséquence civile et non d'une peine de nature criminelle. Une instance disciplinaire de la police constitue un processus interne purement administratif. Sa conséquence possible la plus grave la rend semblable à une instance disciplinaire dans le contexte des rapports ordinaires employeur‑employé, même si la procédure qui la régit est nettement plus formelle. L'objet fondamental du congédiement d'un employé n'est pas de le punir au sens habituel de ce terme (pour le dissuader ou le corriger ou peut‑être, pour appliquer une certaine forme moderne de châtiment), mais plutôt de soulager l'employeur du fardeau que représente l'employé qui a démontré qu'il n'est pas à la hauteur de sa tâche.

 

L'autorisation de pourvoi devant cette Cour a été accordée le 27 novembre 1986.

 

4.                Voici les questions constitutionnelles qui ont été formulées par la Cour:

 

1. L'alinéa 11 d )  de la Charte canadienne des droits et libertés  (ci‑après appelée la "Charte ") s'applique‑t‑il aux procédures disciplinaires de la police prévues par le règlement 791, R.R.O. 1980, établi en vertu du par. 74(1) de la Police Act, L.R.O. 1980, chap. 381 et ses modifications?

 

2. Si l'alinéa 11 d )  de la Charte  s'applique à ces procédures, le règlement 791, R.R.O. 1980, est‑il incompatible avec elle et, dans l'affirmative, l'article premier de la Charte  permet‑il de le justifier?

 

5.                Les dispositions législatives applicables ont été énoncées dans l'arrêt connexe Trimm c. Police régionale de Durham, [1987] 2 R.C.S. 582. Pour les raisons données dans l'arrêt R. c. Wigglesworth, [1987] 2 R.C.S. 541, l'art. 11 ne s'applique pas aux procédures disciplinaires de la police prévues par le règlement 791, R.R.O. 1980. Les procédures disciplinaires en l'espèce, qui sont identiques à celles auxquelles on a eu recours dans les arrêts connexes Trimm c. Police régionale de Durham et Burnham c. Police de la communauté urbaine de Toronto, [1987] 2 R.C.S. 572, ne sont pas de nature criminelle et ne comportent pas de conséquences pénales. Contrairement à la situation dans l'arrêt Wigglesworth, l'appelant n'est pas susceptible d'être emprisonné aux termes de la Police Act, L.R.O. 1980, chap. 381. Par conséquent, je suis d'avis de répondre par la négative à la première question constitutionnelle. Compte tenu de ma réponse à la première question, il n'est pas nécessaire de répondre à la deuxième question.

 

6.                Je suis d'avis de rejeter le pourvoi.

 

                   Pourvoi rejeté; la première question constitutionnelle reçoit une réponse négative.

 

                   Procureurs de l'appelant Rodney Pugh: Mills & Mills, Toronto.

 

                   Procureur des intimés: George H. Rust‑D'Eye, Toronto.

 

                   Procureur de l'intervenant le procureur général du Canada: Le procureur général du Canada, Ottawa.

 

                   Procureur de l'intervenant le procureur général de l'Ontario: Le procureur général de l'Ontario, Toronto.

 

                   Procureur de l'intervenant le procureur général du Québec: Le procureur général du Québec, Ste‑Foy.

 

                   Procureur de l'intervenant le procureur général du Nouveau‑Brunswick: Le procureur général du Nouveau‑Brunswick, Fredericton.

 

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