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Supreme Court of Canada

Workmen’s Compensation Act—Municipal employee—Cleaning streets and occasionally  working in “dangerous” premises—Injury—Compensation—R.S.Q. (1909) s. 7321—R.S.Q. (1925), c. 274, s. 2.

An employee of a municipal corporation, whose main duties are those of cleaning streets and repairing sidewalks, but who occasionally does some work on municipal premises “in which machinery is used, moved by power other than that of men or of animals,” is not entitled to claim under the Workmen’s Compensation Act, if he be injured while performing his usual work upon the streets of the municipality.

Judgment of the Court of King’s Bench (Q.R. 43 K.B. 355) rev.

APPEAL from the decision of the Court of King’s Bench, appeal side, province of Quebec[1], affirming the judgment of the trial judge, d’Auteuil J. and maintaining the respondent’s action.

The material facts of the case and the questions at issue are fully stated in the judgment now reported.

A. Chase-Casgrain K.C for the appellant.

J. C. Gagné K.C. for the respondent.

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The judgment of the court was delivered by

Mignault J.—L’appelante se plaint d’un jugement de la cour du Banc du Roi (Flynn, Bernier et Hall, JJ.), confirmant, Hall, J., dissentiente, un jugement de la cour supérieure, siégeant dans le district de Chicoutimi, D’Auteuil, J., qui accordait à l’intimée une indemnité de $3,050, sous la loi des accidents du travail, pour la mort de son mari, le nommé Joseph Thibault, à la suite d’un accident pendant qu’il travaillait pour le compte de l’appelante, comme balayeur des rues, le 16 juillet 1924. La seule question que nous ayons à décider, c’est de savoir si la loi des accidents du travail s’applique dans l’espèce.

Thibault, lors de cet accident, nettoyait une des rues de la municipalité avec son cheval et sa voiture. C’est le cheval d’un tiers, lancé à l’épouvante, qui causa cet accident. Thibault fut frappé par la voiture que traînait ce cheval, et il est mort de ses blessures le lendemain. La preuve ne nous éclaire pas quant aux conditions de l’engagement de Thibault. Le trésorier de la ville a fait des recherches afin de découvrir, si possible, une résolution du conseil le nommant, mais ces recherches ont été infructueuses. Cependant on admet que Thibault était un employé permanent de l’appelante, et qu’il était payé tant de l’heure, avec une légère augmentation quand il fournissait son cheval et sa voiture.

D’après un état produit par le trésorier de la ville, Thibault aurait commencé son travail le ler mai 1923, et c’était surtout au département de la voirie, sous les ordres du contremaître Harvey, qu’il était employé. La ville de Jon-quières possède un aqueduc et des égouts, et elle vend et distribue l’électricité, soit pour l’éclairage, soit pour la force motrice. Elle a également des machines mues par une force autre que celle de l’homme et des animaux—on mentionne un rouleau à vapeur, un concasseur et un malaxeur —et il y a naturellement une dynamo au département de l’électricité. Un témoin dit que Thibault a été engagé pour faire marcher le concasseur et qu’il l’y a vu travailler, mais cela paraît avoir été au début de son engagement. Dans l’été de 1924, Harvey, le contremaître de la voirie, employait Thibault pour faire le nettoyage des rues et aussi pour la réparation des trottoirs en bois. Il dit qu’il ne s’est pas servi de machines pendant cet été. Bien que

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le travail de Thibault relevât presque exclusivement du département de la voirie, l’état produit par le trésorier fait voir que, de temps à autre, Thibault donnait un peu de temps aux autres départements. Harvey explique que lorsque le contremaître du département électrique lui demandait un homme, il y envoyait Thibault, quand il pouvait s’en passer, pour une heure des fois, d’autres fois pour une journée. Noël, le contremaître du département électrique, dit que Thibault a travaillé pour lui lors de la construction des dynamos, et qu’il a été occupé à cette construction du ler novembre 1923 au ler janvier 1924.

Le juge de première instance n’a fait aucune constatation de fait, se contentant de dire que la demanderesse avait prouvé les allégations essentielles de sa déclaration. En vue du manque de précision de la preuve testimoniale, il paraît plus sûr de s’en rapporter à l’état produit au dossier, et qui est un extrait du livre de paye de la ville. Or cet état démontre, je l’ai déjà dit, que l’ouvrage pour lequel Thibault a été payé relevait en très grande partie du département de la voirie, et que ce n’est qu’exceptionnellement qu’il a travaillé ailleurs que dans les rues. Ainsi, depuis le ler mai 1923 jusqu’au 16 juillet 1924, Thibault a reçu les sommes suivantes comme prix de son travail: rues, $796.29; aqueduc, $39.62; égouts, $32.15; département électrique, $113.85; entretien des bâtisses “et autres,” $16.80. Pour la période entre le ler janvier et le 16 juillet 1924, la disproportion est encore plus accentuée, car on a payé à Thibault $281.32 pour les rues; $20.27 pour l’aqueduc; $13.55 pour les égouts; $8.55 pour le département électrique, et $13.35 pour entretien des bâtisses “et autres”.

Dans ces circonstances, la question qui se pose est de savoir si un journalier qui d’ordinaire travaille dans les rues d’une municipalité, mais qui exceptionnellement a pu de temps à autre faire de l’ouvrage dans des départements municipaux où on fait usage de machines mues par une force autre que celle de l’homme ou des animaux, bénéficie des dispositions de la loi des accidents du travail lorsqu’il lui arrive un accident pendant qu’il fait son travail habituel dans les rues.

Citons ici la disposition introductive et fondamentale de cette loi, l’article 7321 S.R.Q., 1909. J’en donne le texte

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tel qu’il se lisait lors de l’accident, en y comprenant les amendements jusqu’à cette date:

7321. Les accidents survenus par le fait du travail, ou à l’occasion du travail, aux ouvriers, apprentis et employés occupés dans l’industrie du bâtiment, dans les usines, manufactures et ateliers, et dans les chantiers de pierre, de bois ou de charbon; dans les entreprises de transports par terre ou par eau, de chargement ou de déchargement, dans celles de gaz ou d’électricité, de construction, de réparation ou d’entretien de chemins de fer ou tramways, d’aqueducs, d’égouts, de canaux, de digues, de quais, de docks, d’élévateurs et de ponts; dans les mines, minières, carrières, et, en outre, dans toute exploitation industrielle, dans laquelle sont fabriquées ou mises en oeuvre des matières explosives, ou dans laquelle il est fait usage d’une machine mue par une force autre que celle de l’homme ou des animaux, donnent droit, au profit de la victime ou de ses représentants, à une indemnité réglée conformément aux dispositions ci-après.

La présente loi peut être citée sous le nom de Loi des accidents du travail de la province de Québec, et elle ne s’applique pas à l’industrie agricole ni à la navigation à voile. (9 Ed. VII, c. 66, s. 1, et 8 Geo. V, c. 71, s. 1).

Lorsqu’une corporation municipale entreprend ou fait exécuter elle-même des travaux publics dans des conditions qui rendraient l’entrepreneur sujet aux dispositions de la présente loi, elle y devient soumise elle-même. (10 Geo. V, c. 75, s. 1. Amendement de 1920).

Le jugement de la cour d’appel dit que

la majorité des travaux pour lesquels la victime de l’accident était engagée par l’appelante, tombaient, soit par leur nature, soit par la manière dont ils étaient exécutés, sous les dispositions de la Loi des accidents du travail, et que le travail particulier auquel était employé la victime au moment de l’accident, quoique ne tombant pas sous cette loi, ne pouvait lui faire perdre à lui, ou à ses ayants cause, le bénéfice de cette loi à laquelle l’appelante était soumise.

Nous ne pouvons juger des conditions de l’engagement de Thibault que par les travaux qu’il a actuellement faits pour rappelante, et alors il m’est impossible de dire, avec la cour d’appel, que la majorité de ces travaux tombaient sous les dispositions de la loi des accidents du travail. Au contraire, la très grande majorité de ces travaux, nous l’avons vu, étaient des travaux dans les rues, sans machines, semblables à l’ouvrage que faisait Thibault lors de l’accident, et qui, la cour d’appel le reconnaît, ne tombait pas sous la loi des accidents du travail. Le fait ici domine le droit, et je n’ai pas besoin de discuter les décisions citées de part et d’autre.

Ces décisions, du reste, me paraissent être des arrêts d’espèce. Ainsi, dans la cause de Ferron v. Cité de Shawinigan[2], sur laquelle l’intimée s’appuie, il s’agissait de

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trottoirs en béton qu’on construisait avec l’aide d’un malaxeur mû à la vapeur, et le gardien de nuit qui veillait aux travaux obtint de la cour d’appel une indemnité pour accident de travail. De même, dans Nicholaichook v. City of Westmount[3], que cite l’appelante, la victime n’était employée que pour de simples travaux de rues, semblables à ceux que faisait Thibault, et la cour de révision n’a pas eu égard au fait que

the corporation may occasionally have operated a steam roller in its streets, and had a macadam mixer in its yard run by steam.

Ce qui importe en ces matières, c’est la nature de l’entreprise dans laquelle l’ouvrier est occupé. Le législateur, par l’énumération de l’article 7321, a reconnu que certaines entreprises entraînent pour l’ouvrier un risque d’accident contre lequel il a voulu le protéger. C’est le risque professionnel. En dehors des entreprises énumérées qui entraînent ce risque, l’ouvrier accidenté ne peut obtenir une indemnité que suivant le droit commun, en établissant une faute à la charge de son patron.

Pas plus que les individus, une municipalité n’échappe à la responsabilité créée par la loi des accidents du travail, à la condition, toutefois, qu’il s’agisse d’une entreprise énu-mérée dans l’article 7321; et, à cette fin, chaque entreprise de la municipalité doit être envisagée séparément. Pour me servir des termes mêmes de l’amendement de 1920, la municipalité est soumise à cette loi quand elle

entreprend ou fait exécuter elle-même des travaux dans des conditions qui rendraient l’entrepreneur sujet aux dispositions de la présente loi,

et alors seulement à l’égard de ceux de ses employés qui sont occupés dans cette entreprise. Cette condition ne s’est pas réalisée dans l’espèce, et il s’ensuit que l’intimée ne peut invoquer cette loi.

Avec toute déférence possible, je suis donc d’avis de maintenir l’appel et de renvoyer l’action, avec dépens dans toutes les cours en faveur de l’appelante.

Appeal allowed with costs.

Solicitors for the appellant: Casgrain, McDougall, Stairs & Casgrain.

Soliciter for the respondent: J. C. Gagné.



[1] (1926) Q.R. 43 K.B. 355.

[2] (1925) Q.R. 39 K.B. 370.

[3] 27 R.L., n.s., 447.

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