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Supreme Court of Canada

Rotondo c. The Queen, [1963] SCR 496

Date: 1963-01-22

Droit criminel—Possession d'un objet volé—Preuve de possession au sens de l'art. 296 du Code Criminel.

L'appelant fut trouve coupable d'avoir eu en sa possession un radio d'automobile sachant qu'il avait été vole. Ce radio fut vole par un nomme Corbin qui le cacha dans le bas de la ville de Montréal. Quelques heures plus tard, dans la soirée, Corbin et deux autres personnes prirent place dans le nord de la ville dans l'automobile de l'appelant qui était accompagne d'un nomme Whitworth. Ils descendirent vers le bas de la ville pour s'arrêter dans le voisinage de l'endroit ou Corbin avait cache le radio. A ce moment ou quelques instants auparavant Corbin informa l'appelant qu'il avait quelque chose a lui donner. Corbin alla chercher le radio et le rapporta en le cachant sous son manteau. Après avoir laisse Corbin et ses deux compagnons en cours de route, l'appelant conduisit Whitworth à un endroit où celui-ci cacha le radio. L'appelant témoigna qu'au cours de la randonnée il avait déclaré: «Moi je veux rien avoir, avec ca».

La Cour d'Appel, par un jugement majoritaire, rejeta l'appel. Le juge dissident jugea qu'il n'avait pas été établi que l'appelant avait eu la possession physique ou le contrôle du radio. L'appelant a obtenu permission d'appeler devant cette Cour sur la question de savoir s'il y avait au dossier une preuve légale justifiant la conclusion qu'il y avait eu possession au sens de l'art. 296 du Code Criminel.

Arrêt: L'appel doit être rejeté.

L'ensemble de la preuve établit raisonnablement que le juge au procès pouvait judicieusement conclure   comme il le fit—que l'appelant savait
que l'objet dont Corbin lui fit don était le radio, qu'il savait qu'il s'agissait d'un objet vole, et qu'il en avait eu, au moins pour un temps appréciable, la possession. Si la déclaration de l'appelant, rapportée dans son témoignage, permettait au juge de déduire qu'il savait alors

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qu'il s'agissait d'un objet vole, le juge était libre de croire ou de ne pas croire que l'appelant avait véritablement fait cette déclaration. Au regard des arts. 3(4) et 300 du Code et du dossier, rien ne permet d'écarter validement la déclaration de culpabilité.

APPEL d'un jugement de la Cour du banc de la reine, province de Québec[1], confirmant le verdict de culpabilité prononce contre ''appelant. Appel rejeté.

N. Losier, pour l'appelant.

J. Bellemare, pour l'intimée.

Le jugement de la Cour fut rendu par

LE JUGE FAUTEUX:—Accuse d'avoir à Montréal, le 30 mars 1961, (i) vole un radio d'automobile, d'une valeur de $135, et (ii) eu en sa possession ce radio, sachant qu'il était vole, l'appelant, a l'issue du procès, fut acquitte du vol et trouve coupable de recel.

Il appela de cette condamnation à la Cour du banc de la reine siégeant en appel, ou il soutint en somme que les éléments du recel n'avaient pas été légalement prouves. Cette prétention fut rejetée comme non fondée par MM. les Juges Taschereau et Owen, formant la majorité. M. le Juge Bissonnette, dissident, fut d'avis qu'il n'était pas établi que l'accuse avait eu la possession physique ou le contrôle du radio. L'appel fut rejeté.

Dans un pourvoi subséquent a cette Cour, appelant invoqua la dissidence prononcée en Cour d'Appel et soumit particulièrement, comme grief d'appel, suivant la permission d'appeler par lui obtenue, qu'il n'y a au dossier aucune preuve légale justifiant la Cour de conclure que l'appelant a eu la possession de ce radio au sens de l'art. 296 du Code Criminel sous lequel il avait été accusé.

Les témoins entendus sur les circonstances précédant et accompagnant le fait reproche a l'appelant sont tous plus ou moins impliqués en l'affaire. Leurs témoignages, non dépourvus de réticences ou de contradictions, permettent d'en faire ce résumé.

Dans l'après-midi du 30 mars 1961, Fernand Corbin vola le radio en question alors qu'il était fixe a une automobile stationnée dans le bas de la ville en arrière d'un immeuble

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de la rue St-Denis, près de la rue Notre-Dame-de-Lourdes, véhicule qu'il avait illégalement déplacé aux fins de ce vol. Il cacha le radio dans une cour privée attenante à la rue Notre-Dame-de-Lourdes et dont l'accès était protégé par une clôture. Le même jour, vers les neuf heures du soir, Corbin, Marcel Plante et Charles Vincent, se trouvant alors dans le nord de la ville, prirent place dans une automobile conduite par l'appelant, en compagnie duquel se trouvait déjà Wayne Whitworth. Tous ces occupants de la voiture, a l'exception de Rotondo qui était âgé de près de quarante ans, étaient des jeunes gens de quinze a dix-neuf ans. Ils descendirent tous vers le bas de la ville pour s'arrêter dans le voisinage immédiat de l'endroit ou Corbin avait cache le radio. C'est alors que Corbin, muni d'outils, se rendit dans la cour privée, prit le radio et le rapportera l'automobile en le cachant sous son manteau. Repartis de cet endroit, les occupants de la voiture, a l'exception de Rotondo et Wayne Whitworth, se firent laisser a une salle de pool et Rotondo conduisit Whitworth a un endroit où celui-ci cacha le radio. A un certain moment, avant ou au moment d'arriver à la cour privée, Corbin informa Rotondo qu'il avait quelque chose 'a, lui donner. Il ne fait aucun doute, suivant la preuve, que ce quelque chose était le radio que Corbin avait rapporte a l'automobile avec ses outils, au vu de certains sinon de tous les occupants de la voiture. Sans entrer dans le détail et la discussion des témoignages rendus par ces jeunes gens et l'appelant, l'ensemble de la preuve faite par ces témoins, dont la tenue en Cour aussi bien que les témoignages ont pu être apprécies par le Juge au procès, établit raisonnablement que ce dernier pouvait judicieusement conclure—comme il le fit—que l'appelant savait que l'objet dont Corbin lui fit don était le radio, qu'il savait qu'il s'agissait d'un objet vole, et enfin qu'il en avait eu, au moins pour un temps appréciable, la possession. Entendu comme témoin, pour sa propre défense, Rotondo admit avoir déjà été condamne pour vol avec effraction et recel. Il témoigna qu'a un moment, au cours de cette randonnée en automobile, il avait déclaré :—«Moi je veux rien avoir à faire avec ca». Si cette déclaration, rapportée dans son témoignage, permettait au Juge de déduire que Rotondo savait alors qu'il s'agissait d'un objet vole, le Juge était libre de croire ou de ne pas croire que Rotondo avait véritablement fait cette déclaration au cours

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de l'affaire. La section 4 de l'art. 3 du Code Criminel définit ainsi la possession:

Aux fins de la présente loi,

a) Une personne est en possession d'une chose lorsqu'elle l'a en sa possession personnelle ou que, sciemment,

(i) elle l'a en la possession ou garde réelle d'une autre personne, ou

(ii) elle l'a en un lieu qui lui appartient ou non ou quelle occupe ou non, pour son propre usage ou avantage ou celui d'une autre personne; et

b) Lorsqu'une de deux ou plusieurs personnes, au su et avec le consentement de l'autre ou des autres, a une chose en sa garde ou possession, cette chose est censée sous la garde et en la possession de toutes ces personnes et de chacune d'elles.

Et l'article 300 édicte:

Pour l'application de l'article 296 et de l'alinéa b) du paragraphe (1) de l'article 298, l'infraction consistant à avoir en sa possession est consommée lorsqu'une personne a, seule ou conjointement avec une autre, la possession ou le contrôle d'une chose mentionnée dans ces articles ou lorsqu'elle aide à la cacher ou a en disposer, selon le cas.

Ayant attentivement considéré la preuve et tous les moyens de droit soulevés de la part de l'appelant, je dirais qu'au regard de la loi et du dossier, rien ne permet d'écarter validement la déclaration de culpabilité prononcée contre l'appelant en première instance et confirmée par le jugement de la Cour du Banc de la Reine siégeant en appel.

Je renverrais l'appel.

Appel rejeté.

Procureur de l'appelant: Norbert Losier, Montréal.

Procureur de l'intimée: Michael Franklin, Montréal.



[1] [1962] B.R. 653.

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