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COUR SUPRÊME DU CANADA

 

Référence : R. c. Lee, 2010 CSC 52, [2010] 3 R.C.S. 99

Date : 20101112

Dossier : 33575

 

Entre :

Christopher John Lee

Appelant

et

Sa Majesté la Reine

Intimée

 

Traduction française officielle

 

Coram : Les juges Binnie, LeBel, Deschamps, Fish, Abella, Charron et Cromwell

 

Motifs de jugement :

(par. 1 à 8)

La Cour

 

 



R. c. Lee, 2010 CSC 52, [2010] 3 R.C.S. 99

 

Christopher John Lee                                                                                       Appelant

 

c.

 

Sa Majesté la Reine                                                                                            Intimée

 

Répertorié : R. c. Lee

 

2010 CSC 52

 

No du greffe : 33575.

 

2010 : 3 novembre; 2010 : 12 novembre.

 

Présents : Les juges Binnie, LeBel, Deschamps, Fish, Abella, Charron et Cromwell.

 

en appel de la cour d’appel de l’alberta

 

                    Droit criminel ― Verdict raisonnable ― Accusé déclaré coupable d’agression sexuelle armée et de séquestration ― Y a‑t‑il eu application de la bonne norme de contrôle? ― La preuve était‑elle recevable? ― Le critère d’appréciation du doute raisonnable a‑t‑il été appliqué correctement?

 

                    Arrêt Le pourvoi est rejeté.

 

                    Le verdict était l’un de ceux qu’un jury qui a reçu des directives appropriées et qui agit d’une manière judiciaire aurait pu raisonnablement rendre.  Il n’y avait pas matière à réformation en appel relativement à des questions de preuve, et la juge du procès n’a pas appliqué erronément la norme du doute raisonnable à l’ensemble de la preuve.

 

Jurisprudence

 

                    Arrêts mentionnés : R. c. W. (D.), [1991] 1 R.C.S. 742; Corbett c. La Reine, [1975] 2 R.C.S. 275; R. c. Biniaris, 2000 CSC 15, [2000] 1 R.C.S. 381; R. c. Lohrer, 2004 CSC 80, [2004] 3 R.C.S. 732; R. c. Yebes, [1987] 2 R.C.S. 168.

 

Lois et règlements cités

 

Code criminel , L.R.C. 1985, ch. C‑46 , art. 691(1) a).

 

                    POURVOI contre un arrêt de la Cour d’appel de l’Alberta (les juges McFadyen, Berger et Slatter), 2010 ABCA 1, 23 Alta. L.R. (5th) 76, 251 C.C.C. (3d) 346, 474 A.R. 203, 479 W.A.C. 203, [2010] 7 W.W.R. 613, [2010] A.J. No. 72 (QL), 2010 CarswellAlta 135, qui a confirmé la déclaration de culpabilité de l’accusé.  Pourvoi rejeté.

 

                    Deborah R. Hatch, pour l’appelant.

 

                    Troy L. Couillard, pour l’intimée.

 

                    Version française du jugement rendu par

[1]                              La CourSur le fondement de l’al.  691(1) a) du Code criminel , L.R.C. 1985, ch. C‑46 , l’appelant interjette appel de plein droit de sa déclaration de culpabilité pour les accusations d’agression sexuelle armée et de séquestration.  Malgré son argumentation habile présentée pour le compte de l’appelant, Me Hatch ne nous convainc pas, et le pourvoi doit être rejeté.

[2]                              Les points de droit pour lesquels l’un des juges de la Cour d’appel de l’Alberta exprime sa dissidence et, par conséquent, les points en litige dans le présent pourvoi, sont les suivants :

1.         les juges majoritaires de la Cour d’appel ont appliqué la mauvaise norme de contrôle;

 

2.         ils ont appliqué le mauvais critère pour apprécier la recevabilité de la preuve relative aux « enjambées caractéristiques d’une course »;

 

3.         ils ont eu tort de conclure que la juge du procès avait correctement appliqué le critère d’appréciation du doute raisonnable énoncé dans l’arrêt R. c. W. (D.), [1991] 1 R.C.S. 742.

[3]                              Les faits sont essentiellement les suivants.  La plaignante, accompagnée d’un copain, a rencontré l’appelant, également flanqué d’un ami, aux petites heures du matin, à l’extérieur d’une boîte de nuit d’Edmonton.  Les choses se sont rapidement envenimées, au point où l’appelant a pris la plaignante et son compagnon en chasse.  Ce qui s’est ensuite produit a en grande partie été contesté au procès, mais il est établi que, peu après, la plaignante a finalement eu un rapport sexuel oral avec l’appelant derrière une école voisine.  Il est également avéré que peu de temps après, la plaignante s’est présentée à une résidence située non loin de là, qu’elle pleurait, qu’elle paraissait éperdue et qu’elle prétendait avoir été victime d’agression sexuelle.  Selon la version de la plaignante, l’appelant l’avait contrainte au rapport sexuel en la menaçant à la pointe d’un couteau.  Selon celle de l’appelant, après l’altercation initiale, leurs échanges étaient devenus plus amicaux et c’était de son plein gré que la plaignante l’avait accompagné pour se livrer à l’acte sexuel.  La seule véritable question à trancher au procès était celle du consentement de la plaignante.  Dès lors, l’issue du procès tenait à la crédibilité de la plaignante et à celle de l’appelant.

[4]                              La prétention voulant que les juges majoritaires de la Cour d’appel aient eu tort d’appliquer le critère du verdict déraisonnable établi dans l’arrêt Corbett c. La Reine, [1975] 2 R.C.S. 275, et confirmé plus récemment dans R. c. Biniaris, 2000 CSC 15, [2000] 1 R.C.S. 381, au lieu de celui de la réformation en appel lorsqu’il y a eu interprétation erronée de la preuve comme dans l’affaire R. c. Lohrer, 2004 CSC 80, [2004] 3 R.C.S. 732, doit être rejetée.  À une légère exception près, ils ont estimé que les erreurs d’interprétation de la preuve alléguées par l’appelant constituaient simplement des interprétations différentes de la preuve par la juge.  Nous en convenons.  La conclusion des juges majoritaires, sauf pour ce qui concerne le débat périphérique sur la chronologie précise des événements, est étayée par une lecture attentive du dossier.  À notre avis, l’objet de ce débat est sans importance.  Le verdict était l’un de ceux qu’un jury qui a reçu des directives appropriées et qui agit d’une manière judiciaire aurait pu raisonnablement rendre (Corbett, p. 282; voir également R. c. Yebes, [1987] 2 R.C.S. 168, p. 185).

[5]                              Le deuxième point touche le témoignage d’un policier relatif à des empreintes de pieds dans la neige.  Le témoin, un maître de chien pisteur, a laissé entendre que les personnes qui les avaient faites — l’appelant et la plaignante, supposait‑il — avaient couru.  L’agent de police a dit être compétent pour interpréter les empreintes, ce qui n’a pas été contesté par la défense.

[6]                              La juge du procès a conclu que la preuve matérielle contredisait la version de l’appelant, et il s’agit de l’un des douze motifs pour lesquels elle a dit ne pas ajouter foi au témoignage de l’appelant ni avoir quelque doute quant à sa culpabilité.  On fait valoir que certains éléments de cette preuve échappaient aux limites établies d’un témoignage d’opinion.  Or, la défense ne s’est pas opposée à sa recevabilité au procès et elle s’en est en fait servie pour étayer le témoignage de l’appelant.  La juge du procès s’est seulement fondée sur le témoignage du policier selon lequel, au vu des empreintes observées dans la neige, [traduction] « on aurait dit qu’une personne avait couru pour échapper à d’autres » (d.a., p. 129).  Comme l’a dit l’avocat du ministère public en plaidoirie, même un enfant aurait pu arriver à cette conclusion en observant les traces trouvées dans la neige.  Avec égards, il n’y avait pas matière à intervention en appel pour ce motif.

[7]                              Pour ce qui est de l’application du principe dégagé dans l’arrêt W. (D.), considérés globalement, les motifs de la juge du procès n’appuient pas la conclusion du juge dissident de la Cour d’appel voulant qu’elle ait appliqué de manière erronée la norme du doute raisonnable à l’ensemble de la preuve.

[8]                              Le pourvoi est rejeté.

 

                    Pourvoi rejeté.

 

                    Procureurs de l’appelant : Gunn Law Group, Edmonton.

 

                    Procureur de l’intimée : Justice Alberta, Edmonton.

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